Actualités - Actu en bref

Bulletin de veille – Avril 2022

L’actualité dans vos domaines

Vers de nouvelles fonctions pour les cahiers de laboratoire électroniques ? Faisant le constat du nombre “insensé” de solutions de cahiers de laboratoire électroniques (ELN) développées ces dernières années, des chercheurs en chimie de l’EPFL appellent à rationaliser les pratiques actuelles. Dans un article prospectif publié le 4 avril dans Nature Chemistry, les auteurs estiment que les ELN devraient être le levier principal d’une recherche plus efficace fondée sur l’analyse automatique de données. Parmi les pistes avancées, le fait qu’un ELN effectue la conversion de données de spectrométrie dans un format structuré et réutilisable, que les ELN soient interfacés avec des entrepôts de données en ligne et que les expériences infructueuses soient également prises en compte dans les analyses menées. Le requêtage ainsi rendu possible serait une promesse d’efficacité : “pour une voie de synthèse, il y aura 100 réactions infructueuses et 2 réactions réussies alors qu’une autre voie fera apparaître 90 réactions réussies et 10 échecs – ce qui donne clairement une indication de la voie à essayer en premier.”

ACS prévoit de basculer, à terme, l’ensemble de ses revues en accès ouvert. Dans un communiqué publié le 26 avril, l’éditeur annonce qu’il s’engage à respecter les conditions du Plan S, afin de transformer à terme ses revues dites « hybrides » (accès payant sur abonnement et publication en open access payante) en revues en accès ouvert intégral. Les objectifs de progression des articles en accès ouvert d’ici la fin de l’année ont été définis dans ce document qui recense une soixantaine de revues.

Des revues en chimie et physique rejoignent le modèle “Subscribe to Open”. A partir du mois d’avril 2022 et pour une durée de 18 mois, l’éditeur Annual Reviews appliquera un nouveau modèle visant à basculer ses 51 revues en accès ouvert (contre 8 revues jusqu’ici), sans pour autant facturer les auteurs, apprend-on dans un communiqué publié début avril. Le principe ? “Subscribe to open”, perçu comme une alternative au modèle gold et déjà bien implanté dans la communauté des mathématiques. Tant que les bibliothèques s’abonnent aux revues, celles-ci restent en accès ouvert. Si elles se désengagent, les contenus ne sont plus librement accessibles. Parmi les revues concernées publiées par Annual Reviews, citons par exemple Annual Review of Physical Chemistry, Annual Review of Analytical Chemistry, Annual Review of Chemical and Biomolecular Engineering ou encore Annual Review of Condensed Matter Physics. La revue Astronomy & Astrophysics, éditée par EDP Sciences, s’inscrit dans la même dynamique puisqu’elle est disponible depuis avril 2022 en accès ouvert grâce au modèle “subscribe to open”.

Ouvrir ses données sans être cité comme co-auteur : une réalité qui dérange. S’appuyant sur une étude récente en neurosciences réalisée grâce à 120 000 imageries cérébrales, un article publié dans Nature fait remarquer que les auteurs ayant partagé leurs données en ligne librement sont simplement cités, pendant que ceux appliquant des restrictions d’usage liées aux droits de propriété intellectuelle sont propulsés dans la liste (très longue) des co-auteurs de l’article. Une réalité qui sonne comme un avertissement : “La révolution de l’open data n’arrivera pas tant que le système de recherche ne valorisera pas le partage des données autant que la production d’articles.” 

Des outils pour la gestion des données adaptés à la communauté Photon et neutron (PaN). Un webinaire organisé le 8 avril 2022 par le MESRI, l’ESRF, SOLEIL et l’ILL a permis de faire le point sur les outils mis en place dans le cadre des projets PaNOSC et ExPaNDS afin d’améliorer les pratiques en matière de science ouverte. A ainsi été présentée la plateforme Visa développée par l’ILL, qui permet l’accès et l’analyse de données expérimentales à distance. Autre outil : la plateforme d’apprentissage Training and Learning platform, qui propose des centaines de ressources sur la production de jeux de données FAIR dans les spécialités concernées (voir par exemple ce webinaire). A également été développé un standard de métadonnées fondé sur une ontologie commune, auquel s’ajoute l’utilisation d’un logbook, équivalent d’un cahier de laboratoire électronique rassemblant les expériences du Synchrotron (ESRF). Voici le lien pour tous les détails du webinaire.

Un nouveau prix pour récompenser les chercheurs en chimie. “Décarbonation, recyclage, avancées dans les domaines de la santé et de l’agroalimentaire, nouveaux systèmes industriels…” Voici quelques exemples de champs de recherche susceptibles d’être récompensés par un nouveau prix lancé par la fondation Gay Lussac et l’Académie des sciences, visant des projets en lien avec “les enjeux de société”.

Revues prédatrices et intégrité scientifique

Revues et conférences prédatrices : un phénomène en explosion malgré les politiques de sensibilisation. Un rapport publié fin mars sous l’égide de l’InterAcademy Partnership (IAP) dresse un bilan très complet du paysage des revues prédatrices qui seraient actuellement au nombre de 15 574. Parmi les disciplines les plus concernées, les sciences médicales, qui coalisent un tiers des revues prédatrices. Conséquence : “un nombre élevé d’articles issus de revues prédatrices sont indexées dans Pubmed”. Plus étonnant encore, le nombre de revues prédatrices en chimie, physique et mathématiques excéderait le nombre de revues sérieuses (3100 vs 2000 respectivement). Est par exemple cité “Progress in Physics”, accusé de colporter de la pseudoscience (théorie du mouvement perpétuel où les machines fonctionnent sans énergie.) L’Amérique latine apparaît quant à elle “épargnée” par ce phénomène, du fait que son modèle de publication scientifique repose davantage sur les Universités et les sociétés savantes non-lucratives que sur les éditeurs commerciaux. En parallèle, se multiplient les conférences prédatrices, qui ont lieu “chaque mois” voire “chaque semaine” dans les grandes métropoles. La littérature scientifique se penche moins sur ce phénomène, comme s’il paraissait moins “infamant” que celui des revues prédatrices. 

Un logiciel plus performant pour repérer les articles factices. Baptisé PySciDetect, ce logiciel open source est le prolongement et la version améliorée de SciDetect. Développé par l’éditeur Springer, la société Slimmer AI et le chercheur en informatique de l’Université Grenoble Alpes Cyril Labbé, le logiciel vise à détecter des articles frauduleux virant parfois au canular lorsqu’il sont conçus de manière quasi-automatique grâce à SciGen ou encore MathGen, sans être adossés à des travaux de recherche réels. 

Institutions

To pay or not to pay? “Le CNRS demande instamment à ses chercheurs et à ses chercheuses de ne surtout pas payer pour publier un article dans une de ces revues”, peut-on lire dans un communiqué du 7 avril. “Le paiement d’APC est à proscrire pour les revues hybrides”, renchérit l’Université de Lorraine dans une prise de position adoptée fin mars, qui écarte toute prise en charge de ces frais par un fonds ad hoc. Rebaptisés “Article prestige charges” par le Directeur général délégué à la science Alain Schuhl, ces frais de publication s’attirent de plus en plus les foudres des institutions qui y voient la manifestation des dérives mercantiles des éditeurs. Le cas le plus critique porte sur les revues hybrides, qui facturent les bibliothèques au titre des abonnements, puis facturent les auteurs pour “libérer” leurs articles et les basculer en accès ouvert. 

Ouvrir ses données, c’est bien, mais pas en pdf et pas sur les plateformes des éditeurs. C’est en substance le message adressé dans le guide produit par le collège des données de la recherche du comité pour la science ouverte. “Il est recommandé de ne pas confier les données à partager aux éditeurs des revues qui proposent de les publier sous forme de « supplementary data » ou de « supplementary materials » associés à l’article”, peut-on lire dans le document publié mi-avril. En cause, le format pdf qui rend la réutilisation difficile mais aussi les restrictions d’usage appliquées par les éditeurs. Les auteurs préconisent donc plutôt le recours à des entrepôts en ligne, où le jeu de données déposé renvoie vers la publication et vice-versa.

Vers un changement de paradigme européen sur l’évaluation de la recherche ? En juin prochain, les ministres européens réunis au sein du Conseil compétitivité (dont la ministre Frédérique Vidal fait partie) adopteront une nouvelle position sur la science ouverte. Les conclusions préliminaires abordent notamment l’enjeu de de l’évaluation des chercheurs qui ne devrait plus, selon les ministres, s’appuyer autant sur les indicateurs quantitatifs (facteur d’impact et h-index) liés au nombre de publications mais sur la reconnaissance de « toutes les formes de résultats de recherche, en incluant, entre autres, les jeux de données, les logiciels, codes, méthodologies, protocoles et brevets. »

Baromètre de la science ouverte : comment est-il concocté ? Depuis deux ans déjà, plusieurs établissements de l’ESR publient des bilans statistiques sur le taux de publication en accès ouvert de leurs chercheurs (les derniers chiffres pour Lyon 1 étant disponibles ici). Quelles publications sont prises en compte ? Comment est déterminé le statut, ouvert ou fermé, des articles ? Quelles limites sont actuellement rencontrées ? Cet article répond de manière détaillée à la question de la méthodologie.

Feuille de route de la plateforme Software Heritage pour préserver les codes sources. Software Heritage, plateforme de préservation et de partage des logiciels sous forme de code source, a publié début avril sa feuille de route. Est notamment prévu de développer une interopérabilité entre Zenodo et Software Heritage afin de pousser les codes sources déposés dans le premier vers le second. Une série de tutoriels vient également d’être mise en ligne pour faciliter le dépôt de codes sources dans HAL et Software Heritage.

Etudes et analyses 

Tracking des chercheurs par les éditeurs : une typologie des pratiques. Les bibliothèques et les services de systèmes d’information de la Fondation allemande pour la recherche se sont penchées sur les pratiques des éditeurs visant à étudier le comportement des chercheurs dans le cadre de leurs recherches bibliographiques. Une synthèse traduite en français est désormais disponible sur HAL. Les auteurs constatent que “les grands éditeurs scientifiques ont modifié en profondeur leur modèle commercial, avec des conséquences importantes pour la recherche : l’agrégation et la réutilisation ou la revente des traces d’usage par des utilisateurs.” Parmi les méthodes utilisées, le microciblage, les logiciels de pistage et les logiciels espions. 

La gestion des données de recherche : prioritaire en théorie, négligée dans les faits. C’est la conclusion qui ressort d’une étude menée auprès de 272 Universités et établissements de recherche à l’échelle de 36 pays européens, à l’initiative de l’EUA. Si 71% des répondants octroient une importance haute voire très haute à la gestion des données de recherche, seuls 26% considèrent que sa mise en œuvre est importante ou très importante. Idem pour les données dites “FAIR”, décrites comme importantes ou très importantes par 60% des répondants, alors que leur mise en œuvre ne serait une réalité que pour 13% des établissements ayant répondu.  

Publication d’un ouvrage somme sur les données de recherche. Propriété intellectuelle, statut juridique, ouverture ou fermeture… Dans un ouvrage somme de plus de 600 pages, Agnès Robin, maître de conférence en droit à l’Université de Montpellier, brosse tous les enjeux gravitant autour de la diffusion des données scientifiques.

Innovation

Rebond des demandes de brevets européens, mais pas en France. 188 600 demandes ont été introduites en 2021 auprès de l’office des brevets européens, apprend-on dans un communiqué paru début avril, soit une progression de 4,5% par rapport à 2020. Cette dynamique recèle en revanche des disparités : si les candidats issus de la Chine, de la Suède et des Etats-Unis progressent (+25%, +12% et +5% respectivement), les demandes françaises sont en léger reflux (-0,7%). Là encore, les résultats hexagonaux dans des différents domaines sont très variables : -18% dans le secteur pharmaceutique, -1% en chimie organique fine (contre +37% en Chine), -10% en télécommunication, mais +10% en machinerie agricole et +6% dans le secteur électrique et les instruments de mesure.

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